Comment assurer un sourcing éthique : le cas de l’ylang-ylang de Madagascar avec Jacarandas

Lorsqu’on cherche de nouveaux ingrédients ou matériaux pour l'industrie de la beauté, il est essentiel de se demander quels avantages on peut apporter au monde. Après tout, on n’utilise des matières premières que pour « se mettre sur le visage et le corps ou simplement pour sentir bon », pourrait-on dire. En tant que professionnels de la beauté, nous comprenons aussi que nous ajoutons de la valeur au marché en payant le juste prix pour des produits de qualité tout en évitant l’épuisement des ressources.

Cet été 2024, nous avons visité une distillerie de Jacarandas au cœur de l’île de Nosy Be, au nord de Madagascar. Madagascar, quatrième plus grande île du monde, se situe au large de la côte sud-est de l'Afrique. C'est l'un des pays les plus pauvres au monde, avec environ 75 % de la population vivant en dessous du seuil de pauvreté national de un dollar par jour. Madagascar est également célèbre pour sa biodiversité exceptionnelle, qui inclut la vanille, l’ylang-ylang et les clous de girofle.

Compte tenu de ce contexte, comment pouvons-nous, en tant qu’industrie, nous assurer de ne pas profiter des moins fortunés tout en offrant de meilleures opportunités aux populations locales ?

L’ylang-ylang – une ressource délicate

L’ylang-ylang est un parfum puissant avec une note olfactive particulière qui ne peut pas être synthétisée – tous les parfums ne peuvent pas être reproduits chimiquement – et qui doit être extrait de plantations naturelles. Le parfum est obtenu par distillation, créant une huile essentielle. La fleur est fragile et doit être protégée dans le processus de transformation, qui doit être effectué localement pour éviter les dommages lors du transport. Elle doit également être cueillie manuellement avec douceur pour préserver l'intégrité des fleurs.

Les fleurs d’ylang-ylang poussent sur des arbres adaptés au climat tropical de Madagascar. « L’arbre devient productif à partir de sa cinquième année. Il est taillé pour ne pas prendre trop de hauteur, et ses branches sont ensuite abaissées manuellement pour faciliter la cueillette des fleurs. Un arbre peut produire de 4 à 6 kg de fleurs par an. Les fleurs sont cueillies tôt le matin, et la distillation doit être effectuée dans les 24 heures, avec un rendement d’huile essentielle de 2,5 % », explique Jacarandas.

Les fleurs poussent toute l’année, mais les principales saisons de croissance sont octobre/novembre et mars/avril.

L’ylang-ylang – une resource vitale

Créée en 2020, la distillerie a développé un réseau d'agriculteurs/récolteurs indépendants, comptant aujourd’hui 255 personnes, principalement des familles locales, souvent dirigées par un patriarche transmettant son savoir-faire à la génération suivante.

Jacarandas a mis en place sa plantation d’ylang-ylang sous certifications biologique (Ecocert) et FFL (Fair for Life) pour assurer la traçabilité et des règles spécifiques pour la plantation, la récolte et la transformation.

La traçabilité est cruciale, et connaissant les risques dans la chaîne d'approvisionnement, Jacarandas a instauré des pratiques rigoureuses pour garantir une transparence optimale et un traitement équitable.

Des contrats de collecte sont établis avec un calendrier précis pour les coopératives et les producteurs. Jacarandas garantit également un prix fixe par kilo de fleurs, avec des paiements hebdomadaires ou mensuels selon le choix du producteur, en défendant les droits humains tout en soutenant les producteurs.

Le soutien économique, social et éducatif de Jacarandas est essentiel. Il garantit que les salaires permettent aux familles de vivre dans des conditions justes, soutient les coûts de scolarité pour les familles, et protège les enfants du travail illégal. Par exemple, les producteurs reçoivent un soutien technique et des formations sur l’agriculture de marché et les semences pour élargir leurs compétences et nourrir leurs familles.

« Les agriculteurs malgaches sont connus pour leurs compétences minutieuses et sont un élément clé de la qualité de notre production. Nous voulons nous assurer qu’ils apprennent, grandissent et diversifient leurs opportunités pour être moins dépendants des conditions du marché », explique Benoit Montalègre, agronome de formation et directeur de la plantation.

« Nous croyons que la durabilité offre des opportunités égales dans toute la chaîne d’approvisionnement, et offrir de nouvelles compétences permet aux producteurs au début de la chaîne de bénéficier des retombées d'une industrie fertile », commente l’éditeur. « Il s’agit d’un cycle complet permettant la régénération dans toute la chaîne d’approvisionnement. »

L’ylang-ylang, assurer une approche circulaire

L'eau circule en circuit fermé à la distillerie et est recyclée sur place par des procédés ingénieux. Tous les déchets de production sont réintégrés par compostage ou gestion des effluents et recyclés en engrais vert (poivre sur le site de la plantation) ou en compactage de boues sèches issues des déchets de production et transformées en briques de combustible pour les distillateurs.

Parallèlement, le bois est cultivé grâce à une pépinière d'acacias et planté localement pour offrir une source autonome de bois tout en assurant la régénération des ressources. Jacarandas prévoit de planter 70 000 acacias entre 2024 et 2026.

Jacarandas espère garantir plus de 100 % de ses besoins en bois durable en réduisant sa consommation, en procédant à la reforestation, en mettant en œuvre la sylviculture et en plantant 80 000 pieds (principalement de cannelle) pour la reforestation et la diversification des revenus.

Cette étude de cas illustre nos pratiques durables pour les personnes, la planète et le profit, ainsi qu'une redistribution équitable, assurant l'avenir d'une industrie de la beauté et des parfums propre.